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L’un des freins pouvant ralentir la démarche d’aller consulter un psychothérapeute peut être la difficulté à se sentir légitime d’entreprendre une telle démarche. En effet, le constat que font certaines personnes de n’avoir pas vécu de traumatisme dans leur vie, ou de n’avoir pas eu une enfance particulièrement difficile, les conduit à penser qu’en allant consulter un professionnel, ils risquent de prendre la place de quelqu’un d’autre, une personne qui, elle, aurait « vraiment » besoin de soins psychiques. Pour d’autres, même en l’absence d’une telle crainte, leur démarche reste infondée en ce qu’ils ne parviennent pas à la fonder rationnellement.



Pourtant, cliniquement, le fait même que l’idée d’aller rencontrer un clinicien émerge et qu’elle soit traduite par le fait de commencer une cure est un indicateur suffisant pour valider une telle démarche. Celle-ci est portée par le désir de ne plus souffrir dans le cas de la psychothérapie, et le désir de savoir dans le cas de la psychanalyse (1).



Le chemin qui conduit à identifier la souffrance psychique peut parfois demander du temps. Il n’est d’ailleurs pas rare que cette souffrance psychique soit méconnue, même pour des personnes ayant franchi la porte d’un cabinet de consultation. La souffrance est bien présente, au point qu’elle ait motivée cette initiative, mais les différentes formes d’expression qu’elle revêt peuvent conduire, au moins dans un premier temps, à ignorer les pensées qui lui sont associées. Tant que cette souffrance psychique n’est pas identifiée et mise au travail des associations libres des pensées en psychothérapie ou en psychanalyse, elle pourra trouver des facilités d’expression à travers les voies corporelle et organique. Certains l’identifieront à travers des symptômes corporels (anxiété, phobies, crises non épileptiques psychogènes, nausées, algies, etc.), d’autres la verront à l’œuvre à travers des maladies organiques (c’est-à-dire des affections nécessitant une prise en charge chirurgicale).



Ainsi la souffrance psychique n’est pas nécessairement la conséquence d’un événement bruyant et traumatisant. Elle peut, et c’est le cas pour de nombreuses personnes, provenir d’une accumulation de situations qui ont été mal vécues et qui ont progressivement créées une somme de blessures qu’une première lecture peut faire apparaître comme anecdotiques. Ce jugement n’est bien souvent pas autre chose qu’une tentative de rationalisation visant à faire taire une souffrance qu’il serait plus pratique de continuer à méconnaître. Toutefois, il est fréquent que des patients ayant fait le choix de ne plus « fermer les yeux » ou « mettre les choses sous le tapis » et qui s’engagent dans une démarche clinique de soins psychiques, témoignent des effets que cette tentative de méconnaissance a eu dans leur vie, tant d’un point de vue corporel qu’organique, parfois de manière dramatique. Leur lecture est au fondement du travail du clinicien.


(1) Amorim (de), F. (2011). « Proposition d’une « Cartographie de la clinique avec le malade, le patient et le psychanalysant, à l’usage des médecins, psychistes et psychanalystes, en institution et en ville » », 12 octobre 2011, consulté le 19 décembre 2023, https://www.rphweb.fr/details-proposition+d+une+cartographie+de+la+clinique+avec+le+malade+le+patient+et+le+psychanalysant+a+l+usage+des+medecins+psychistes+et+psychanalystes+en+institution+et+en+ville-140.html


Chloé Blachère

psychothérapeute à Paris 18è