La haine participe pour beaucoup à la construction de l’appareil psychique. Freud indique à ce propos que la haine précède l’amour. Il écrit : « l’objet naît dans la haine » (1), signifiant par là que c’est par l’éprouvé de haine qu’occasionne notamment la frustration que l’être va se différencier de l’autre. La pulsion de destruction éprouvée est telle qu’elle le pousse à s’en différencier pour s’en séparer, opération nécessaire à sa construction psychique.
Ses formes les mieux identifiées sont la violence, la cruauté, le désir de vengeance ou encore le mépris. Ses formes voilées revêtent quant à elles une infinité de possibilités d’expression, repérables en ce qu’elles visent la destruction, celle de son propre corps, ou de celui d’autrui. Elle peut également prendre une forme verbale, visant alors à se détruire psychiquement ou à détruire autrui psychiquement. Symptômes plus ou moins bruyants, tentative de suicide, dépression, bonnes intentions ou gentillesse excessive, négligences, les masques de la haine empruntent toutes les formes lui permettant de s’exprimer.
Ainsi, la haine est le plus souvent tenue refoulée et n’est rendue visible que par les paroles méchantes ou actes de destruction, des plus visibles aux plus discrets. Citons encore pour exemples un discours intérieur dépréciateur quasi continu, des scarifications, une conduite addictive, des pensées suicidaires.
Face à ces assauts qui étouffent l’être et sapent ses perspectives d’aller mieux, le dispositif psychanalytique offre un espace au sein duquel cette haine va pouvoir progressivement se dévoiler, être reconnue et dite clairement et ainsi, progressivement, être traversée, permettant de s’inscrire, au contraire de la destruction, dans une construction subjective dynamique.
(1) Freud, S. (1915). « Pulsions et destins de pulsions », in Métapsychologie, Œuvres Complètes Vol. XIII, 1988, pp. 161-85.
Docteur Chloé Blachère
Psychothérapie et psychanalyse à Paris 18è