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Un patient remarquait récemment en séance combien ça vie avait évolué favorablement depuis qu’il était entré en psychothérapie.
Prenant le temps d’énumérer tous les domaines de sa vie qui pour lui s’étaient arrangés grâce aux séances de psychothérapie, sa vie sexuelle par exemple, certaines angoisses, ou encore son rapport au travail, il découvrait que les raisons qui le conduisait à poursuivre sa psychothérapie n’étaient plus du tout celles qui l’avaient amené à consulter initialement.
Cette découverte a été pour lui un moment joyeux. En effet, découvrir qu’en associant librement ses pensées en séance, certaines souffrances qui jusqu’alors alourdissaient son quotidien n’étaient plus présentes, était pour lui une découverte heureuse.



Mon expérience de psychanalysante, tout comme mon expérience de clinicienne, m’ont appris qu’arriver à un constat tel que celui de cet homme, après un certain temps en psychothérapie et le respect des indications énoncées par le clinicien, passe nécessairement par la décision d’accorder sa confiance à un autre. Pour certains, faire confiance au clinicien est une chose évidente. Une telle disposition peut grandement faciliter l’avancée du travail clinique. Pour d’autres, faire confiance à la personne qui les écoute, parfois pourtant plusieurs fois par semaine, peut demander des années. Il y a là des éléments de leur histoire, conscients et inconscients, qui participent à cette méfiance. Le moment où celle-ci se dénoue constitue un point important qui fait grandement avancer la cure.



A cette difficulté que peut être celle de faire confiance s’ajoute la spécificité du dispositif clinique avec lequel travaille le clinicien (règle s’association libre des pensées, durée des séances, prix des séances), qui pour certains vient exacerber fantasmes et résistances : tout ce qui échappe au contrôle de la situation peut en effet être vécu comme dérangeant, car très éloigné de la représentation imaginaire qui avait été faite des séances chez le « psy ». Pourtant, le dispositif consensuel des séances à durée fixe et à honoraires fixes, s’il peut être rassurant pour le clinicien comme pour le patient, n’est pas corrélé à une consistance clinique argumentée.



Tous ces éléments du dispositif psychothérapeutique ou psychanalytique participent au cheminement clinique initié, et sont autant d’éléments importants pour l’avancée du travail psychique entrepris. Mais ils peuvent être générateurs d’un inconfort parfois puissant qui, chez certains, réveille de l’incompréhension, de la colère, voire de la haine, ce qui dans ce cas constitue un premier temps du travail. Un second temps consiste alors de la part du patient, plutôt que d’abandonner le travail fraîchement initié et d’en vouloir au clinicien qui lui, est en train de faire son travail, d’avoir le courage de venir parler cette colère ou cette haine en séance. Car celles-ci trouvent leurs origines dans un passé lointain dont seul un travail courageux, mu par un désir de savoir, conjointement à l’acceptation de ne pas tout comprendre, permettra de se dégager. Ce courage constitue un pas sur le chemin d’une position responsable et subjective, un pas vers la construction d’une existence plus apaisée et plus vivante.


Ce qui est regrettable pour un être n’est pas d’éprouver colère ou haine, mais de ne pas se saisir du dispositif clinique qu’il a sollicité pour, au moyen de cette colère ou de cette haine ravivée, sortir d’un écueil imaginaire et en sortir grandi.

Chloé Blachère
Psychothérapie et psychanalyse à Paris 18è